mercredi 24 juin 2015

Charleston, par Mumia Abu Jamal

"Un jeune homme blanc, tout juste majeur, entre dans la plus glorieuse église noire de Charleston et, avant qu'il ne s'en aille, une nouvelle page d'histoire est écrite.

Il reste assis près d'une heure au service d'étude biblique du mercredi, mais ne pense ni à la vie de Jésus ni à ses disciples. Il pense à tuer, tuer en masse.

Lorsque la porte se referme derrière lui, neuf âmes noires, des anciens pour la plupart, ont été tuées, bibles en main. L'homme, ou plutôt le garçon, n'était pas venu pour en apprendre davantage sur la religion, car il avait une croyance, la suprématie blanche, ou la haine profonde des Noirs.

La suprématie blanche est le lait maternel de Charleston, en Caroline du Sud, le lait maternel du Sud de l'Amérique. Car, pour sur, tandis que l'esclavage finançait et construisait l'Amérique, le mécanisme sous-jacent était la dévaluation, l'exploitation et l'oppression de la vie noire. Voilà la seule chose qui rend le massacre de l'église à Charleston, même à distance, intelligible.

Neuf personnes noires ont été sacrifiées à l'idole aveugle de la suprématie blanche pour la même raison qui a fait que des milliers d'hommes et de femmes noirs ont été lynchés sur les ormes et pins américains: sacrifiés à une idée, pour perpétuer un système d'injustice économique.

Dylan Roof, le garçon âgé de 21 ans accusé de ce massacre, n'avait pas d'amis à proprement parler, pas d'endroit ou demeurer en dehors du divan d'une connaissance, pas de travail, et une relation ténue avec ses parents. Isolé, aliéné, seul au monde, la seule possession qui lui restait c'était sa blancheur, la seule chose qui donnait un sens à sa vie. Voilà la source de l'énergie qui a alimenté le massacre de Charleston, Caroline du Sud.

C'est maintenant installé comme un cauchemar dans l'âme américaine, bouillonnante de haine et de peur, en attente d'autres vies noires à dévorer. "

by Free Mumia Abu-Jamal

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