mercredi 15 avril 2015

Les 44ème Carifta Games de ST-Kitts


Les 44ème Carifta Games de ST-Kitts du 3 au 6 avril ont tenu toutes leurs promesses dans leur dimension spectaculaire et ne font pas mentir certains experts qui qualifient cette compétition comme le deuxième plus grand meeting mondial junior d’athlétisme après les championnats du monde juniors, en dépit des désordres logistiques d’une organisation mise à mal par un changement récent de gouvernement. En effet, l’ancien en partance n’a pas réglé à temps les réservations d’hôtel ; les délégations se sont trouvées sans chambres et les débuts quelque peu hésitants, dans une pagaille frôlant les crises de nerfs de certains, les agacements d’autres. Ce qui atteste que de grands événements internationaux sont déterminés par la volonté politique et une organisation rigoureuse.

Cependant, les athlètes ont été au rendez-vous preuve de leur détermination et du travail fourni durant l’année que rien ne peut atteindre. 30 records des Carifta ont été battus dont 16 par les jamaïcains, un grand nombre de minimas ont été réalisés pour les futurs événements internationaux (mondiaux de la jeunesse, championnats d’Europe). Ces Carifta ont été extraordinaires !

Les Carifta games véritables juges de paix des politiques sportives donnent les visions d’une Caraïbe conquérante où le sport en général et l’athlétisme en particulier occupent une place majeure. Là encore ST-Kitts a donné à la Caraïbe un signal fort, le dimanche en présence de son citoyen le plus célèbre Sir Kim Collins. Le stade, anciennement baptisé Jubilee stadium, porte désormais son nom : le Kim Collins national stadium. Lors d’une cérémonie chargée d’émotion typiquement britannique, sous le signe d’une réconciliation nationale avec son sportif souvent mis à mal par les institutions de son pays le jour de ces 39 ans Kim Collins a adressé aux jeunes athlètes la fierté de se sentir Caraibéen et de quelle manière cette origine a été une force terrible pour affronter et surtout vaincre les meilleurs athlètes du monde. En exhortant la jeunesse à conquérir et fournir de nouveaux exploits. Le message a eu fort écho chez ses ressortissants qui avec neuf médailles dont  une d’or sortent à la  6ème place.

Quels enseignements tirés de cette édition ? L’athlétisme après le Cricket et le football s’affirme dans la zone. Les constats formulés depuis quelques années se confirment la Caraïbe et son emblème dans l’athlétisme, la Jamaïque, est en marche forcée son renouvellement est plus que là ! Bolt peut se rassurer de la relève des années 2020, il a su tirer et impulser une forte dynamique à travers des programmes de développement cohérents. Le Gold rush qu’annonçaient les presses anglophones a frappé une fois de plus  avec 85 médailles dont 41 en or.
La Jamaïque plus que jamais affirme la force et la cohérence de ses visions et ses programmes de développement dans la densité, la diversité et la compétitivité de leurs athlètes. Les familles de l’athlétisme ne sont  plus cantonnés aux courses de vitesse quand on voit des lanceurs à plus de 70 m au javelot à l’exemple du jeune trinidadien de 15 ans Tyriq Hosford (70,73m) et du grenadien de 19 ans Markin Felix (65,01m) de la Jamaïcaine de 17 ans Sahjay Stevens (48,78m) au disque. L’Austin Sealy Award (meilleure athlète des Carifta) a consacré la Barbadienne Mary Fraser triple vainqueur du 800m 1500m, du 3000m moins de 18ans. Cette vision est impossible dans nos schémas de pensée hexagonaux faire autant d’épreuve de longue distance est impensable. Proposer cela à un de nos athlètes en Guadeloupe est se soumettre à la vindicte fédérale et  populaire : « ou ké kuiyé ti moun la ! ». L’anglophone lui le réalise au moment où notre demi-fond se meurt ! 


Les jamaïcains ont dominés sans partage le sprint en laissant des miettes, bien que surpris par le Barbadien Mario Burke qui double l’or au 100m (10.21)  et au 200m des moins de 20 ans en dominant le favori Raheem Chambers. L’impression de vitesse des quater-miler jamaïcain (coureurs de 400m) est édifiante avec Christopher Taloy, 15 ans (46.64) et Akeem Bloomfield (45.85) effaçant des tablettes pour le plus jeune un certain Bolt. 

La Guadeloupe finit à la 8ème place des nations avec 5 médailles. Les années se suivent et ne se ressemblent pas car l’or n’a pas été au rendez-vous. David (13.40m) record des Carifta au triple saut femmes des moins de 20 ans se voit rafler le titre par la jamaïcaine Moncrieff (14.44m) aidée  d’un vent fort certes mais aussi par le fighting spirit. Hobebar en gros progrès, en argent (15,11m) triple saut  et en bronze (2m hauteur). Les deux médailles de bronze de Fonds à l’heptathlon et du relais 4x100m femmes des moins de 18 ans. 

La Martinique avec 3 médailles 1 argent et 2 bronze finit à la 11ème place, la Guyane, bien que présente n’apparait pas dans les décomptes. Si certains athlètes ont fait des minimas pour les nouveaux rendez-vous internationaux (Hébreu, Carti, Prévot) on est en droit de s’interroger sur le faible nombre de la densité de l’élite, la diversité et la compétitivité de nos ressortissants. Des absences dans les lancers autrefois domaine des athlètes de Georges Beaunol, nous sommes aux abonnés absents dans le demi-fond qui marque le pas sévèrement. Lors du dernier congrès des Carifta arrive bientôt la participation des 12-14 ans. Alors que les préconisations nationales enferment nos jeunes dans un loisir athlétique du « Kid athlé » stérile sur le plan compétitif, nos voisins avec lesquels nous sommes en compétition nous proposent d’autres modèles. Allons- nous continuer à nous enferrer cette voie qui d’années en années en dépit de plan annoncé, tel l’arlésienne, montre à quel point les écarts se creusent inexorablement avec nos voisins économiquement plus pauvre; à quel point nos leaders sportifs  n’arrivent pas à créer des vocations, attirer de nouveaux renouvellement, bien au contraire font fuir les espoirs et désespèrent les cadres?


Harry P. Mephon, sociologue et entraîneur d’athlétisme.


















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