lundi 21 mai 2012

Les déshérités américains parmi les premiers à participer à la « semaine de lutte contre l'OTAN » à Chicago



« Ils trouvent de l'argent pour leurs guerres et pas pour nous »


Aux États-Unis, dans le cœur même de l'organisation atlantiste, l'OTAN fait de moins en moins l'unanimité auprès des couches populaires et des classes moyennes américaines déclassées, touchées de plein fouet par la crise capitaliste, et par le deux poids deux mesures du gouvernement américain, tendre avec le big business, impitoyable avec les travailleurs.

La tenue du sommet de l'OTAN à Chicago ces 20 et 21 mai a été ébranlée par une « semaine d'actions contre l'OTAN », relayée à leur échelle notamment par les communistes américains, remettant en cause l'implication des États-Unis dans cette organisation, et surtout les sommes gaspillées dans des guerres impérialistes à travers le monde.

Les premiers à exprimer leur colère sont les habitants même de Chicago, en particulier ceux des quartiers déshérités, noirs ou latino-américains, qui voient des sommes colossales dépensées pour le sommet, tandis que les infrastructures de leur quartier tombent en ruines.

Nombre d'habitants et d'animateurs sociaux des quartiers populaires de Chicago se sont joints à la protestation générale contre le sommet coordonnée par les mouvements locaux « Grassroot collaborative » et « Occupy Chicago », inspirés par les mouvements de base lancés aux États-Unis depuis plus d'un an.

36 millions pour l'organisation du sommet, rien pour les quartiers de Chicago

Parmi eux, Victor Rodriguez a accueilli les journalistes dans le quartier latino de La Villita, dans son club de boxe qu'il tient à bout de bras et maintient hors des gangs une centaine de jeunes : « 2% des 90 000 habitants du quartier sont impliqués dans des gangs » dit-il, « mais ça suffit pour me dire que la salle de sport fait une différence pour nombre de ces enfants, entre ceux que l'on retire de la rue et ceux qui y restent, et le paient de leur vie bien souvent ».

Quel rapport avec l'OTAN ? « 60% de nos taxes fédérales vont à l'armée », a expliqué Rodriguez. « Dans le seul comté de Cook [district administratif regroupant l'essentiel des habitants de Chicago], 9,8 milliards de $ iront pour financer l'armée et les guerres. C'est beaucoup d'argent qui pourrait être dépensé pour la jeunesse, à traiter la question de la violence et des bandes armées dans nos quartiers ».

Victor Rodriguez dénonce le scandale d'un sommet qui coûtera 36 millions de $, et si le maire de la ville Emmanuel Rahm a pu se vanter que la ville n'ait pas eu à dépenser un sou, la cérémonie étant au frais du Comité des entreprises de Chicago, les activistes sociaux de la ville rappellent que ce sont bien les habitants modestes de Chicago qui paient la facture du sommet :

« Les enfants Afro-américains et latino-américains meurent de ce manque d'emplois et d'investissements dans leurs quartiers, de la saisie de leurs maisons qui deviennent des paradis pour l'usage de drogues et les crimes sexuels, des écoles sont fermées et nous devrions être heureux que de grandes entreprises aient mobilisé plusieurs dizaines de millions de dollars pour des fêtes-caviar. Ces soi-disant généreuses entreprises ont piqué l'argent des contribuables, de là où il devrait aller », rappelle Amisha Patel, membre de la direction de « Grassroot collaborative ».

Il faut rappeler que les grandes entreprises de Chicago se sont gavés d'argent public selon les chiffres officiels : 31 millions de $ pour United Airlines, 24 millions pour Boeing, et 10 millions pour le Chicago Mercantile Exchange.

3 millions d'expulsions aux Etats-unis en 2011, où est le 'droit de l'homme' au logement ?

Parmi les grandes manifestations de la semaine précédant le sommet, celle des dépossédés, des expulsés victimes de la crise immobilière aux États-Unis.

Une centaine d'entre eux ont manifesté devant les locaux de la Citibank et le siège du shérif du comté pour exiger l'ouverture d'un moratoire sur les expulsions dont le shérif a dû accepter qu'il soit public sous la pression des manifestants.

Les manifestants ont dénoncé le fait que 3 millions de propriétaires américains de milieux modestes ont été dépossédés par les banques de leur logement en 2011, en empilant leurs meubles devant l'entrée du siège de la Citibank.

« 100 000 propriétés sont désormais laissées à l'abandon à Chicago, et cela n'a aucun sens d'expulser encore des gens », a déclaré Loren Taylor, de la Camapgne anti-éviction. « Le logement est un droit de l'Homme ».

Interrogé sur la raison pour laquelle il organisait une telle initiative durant la semaine du sommet de l'OTAN, l'activiste local Micah Philbrook d'Occupy Chicago a répondu:« L'OTAN est une organisation pour laquelle on a dépensé beaucoup de l'argent des contribuables. Les Etats-Unis ont dépensé plus de 800 millions de $ pour l'OTAN, et nous pensons que cet argent pourrait mieux être dépensé dans nos quartiers, en permettant aux gens de rester chez eux, par exemple."

Les manifestants continuent jusqu'à celle de dimanche. Enseignants, vétérans de la guerre, fonctionnaires de l'Etat de l'Illinois, tous ont répondu à l'appel lancé par les organisations de base contre le sommet de l'OTAN.

A titre d'exemple, le Syndicat national des infirmières est parvenu à mobiliser à lui seul entre 5 et 10 000 infirmières ce samedi à Chicago pour demander une couverture médicale universelle, la défense d'une santé publique de qualité financés d'une part par la fin des guerres américaines dans le monde ainsi tout simplement que par la taxation de Wall Street.

A Chicago, comme partout ailleurs dans le monde, la lutte contre l'OTAN est une cause de plus en plus unanimement partagée.

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