mardi 18 mai 2010

Pétrole Haïti - La primeur de J.M. Bellerive a figé l'assistance du Colloque de Montréal



Vendredi 5 mars 2010, 13 :30 Hr. – L'Université de Montréal brille de tous ses feux. L'atmosphère est festive. Les ateliers avaient fermé boutique depuis midi. La fierté du devoir accompli s'affiche en gros traits sur les visages. On attend le résultat des synthèses des 10 ateliers du Savant Professeur. L'arrivée du premier Ministre Bellerive est imminente. Malgré la présence de nombreux étrangers, nos compatriotes n'appréhendent aucun faux pas, puisque le personnage annoncé a déjà fait ses preuves à Montréal. Ministre charismatique, affable et articulé, il traverse très bien l'écran. Tout se conjugue pour une fin de colloque positive qui laissera sa marque dans l'histoire de notre communauté.

A l'heure dite, M. Bellerive est fidèle au rendez-vous. Ce qui est tout à son honneur, car, antérieurement, les conférenciers étrangers s'amusaient, tout au long de leur prestation, à jouer malicieusement, avec la notion ou : «heure haïtienne et heure canadienne» quand ils dépassaient leur quota de minutes prescrites. Son allocation terminée, le public est invité au micro.

A la question à savoir s'il y a du pétrole et d'autres mines en Haïti, le P.M. répond par l'affirmative et inonde le public de bonnes nouvelles : « la mise en chantier pour bientôt de raffineries de pétrole, la négociation de contrats de prospections de l'or noir avec certaines compagnies. Les projets sont sur la table, etc.… ». Pour votre édification, voir la vidéo ci-jointe:

L'intervention du premier Ministre Bellerive au colloque de Montréal
http://www.youtube.com/watch?v=RamrsZhJNSU

Le Pétrole d'Haïti et le 1er Min.Bellerive.MPG
http://www.youtube.com/watch?v=r2qL7S3R1f8

Le pétrole d'Haiti et le premier Ministre Bellerive
http://www.youtube.com/watch?v=r2qL7S3R1f8

Bizarre! Le silence de l'assistance m'intrigue au plus haut point. Aucune ovation ne vient troubler la narration de l'auguste personnage à l'annonce de cette primeur. A la sortie, les bribes de conversations entendues ça et là n'ont aucun rapport avec le mot «pétrole». Une certaine indifférence déteint l'euphorie qu'une telle nouvelle aurait suscitée en d'autres circonstances. Quelle en est la raison???

Le contexte

Un mois avant le Colloque, le sujet flottait dans l'air froid de Montréal et animait les conversations. C'était suffisant pour réchauffer les esprits et remonter le moral après le séisme du 12 Janvier. Personne ne savait à quel saint se vouer pour conjurer le mauvais sort et ressusciter le pays agonisant. Le choc était et est encore très dur pour notre psychique. Donc, rêver les yeux ouverts demeurait l'unique thérapie du moment. Le Ministre Bellerive, de passage à Montréal au début de février, avait déclaré, disait-on, à La « Perle Retrouvée », qu'il n'était pas au courant de l'existence d'hydrocarbures en Haïti. Il n'en fallait pas plus pour que le mythe du secret ou des « méchants Américains qui veulent conserver le précieux liquide à des fins stratégiques » enflammât les esprits. Dans un texte publié sur Haïti-Connexion, bien avant la réunion à La Perle, j'invitais mes compatriotes à la prudence. (Voir le texte: «Du Pétrole en Haiti (Rêve ou Utopie)…». Sur les ondes des stations de la diaspora haïtienne, le débat avait monopolisé les micros.

Assistance en état de choc

A la recherche d'une solution immédiate, le monde entier s'est mobilisé pour sauver le malade. Sur les fils de presse, l'expression consacrée, «le pays le plus pauvre », à l'égal des sourdes répliques du tremblement de terre, vient chiffonner, une fois de plus, nos cœurs mortifiés. Faisant fi du désespoir, nos frères ont secoué leur torpeur et remué ciel et terre pour ajouter leur grain de sel dans la recette de la reconstruction, d'où le Colloque des Haïtiens de Montréal et récemment à Miami, celui d'Haiti-C.O.S.H, http://haiticosh.org/ avec le Dr Carl Gilbert, axé sur la Santé. Qu'il soit en paroles ou en rêves, les Haïtiens ne se laisseront pas abattre. Ils en ont vu d'autres.

La pauvreté, les intrigues politiques, l'insécurité, la corruption, la malversation, la couardise, l'ignorance, la gabegie, le népotisme….etc, tout a été érigé en système. La porte de l'exil demeura la seule issue à la moitié du pays. Que de rêves perdus, que de vies brisées, que de familles déchirées loin de la mère-patrie. L'étiquette de mendiants nous a été accolée de par le monde. Au premier échelon des graphiques de l'échec monumental, figure le nom de notre pays. Nous sommes devenus la risée du monde moderne. Alors, quand ton Premier Ministre vient confirmer, à la face du monde, les folles rumeurs de l'existence d'hydrocarbures dans ton sous-sol, tandis que tu es acculé le dos au mur, rien ne te retient pour t'éviter de tomber en syncope. Car, la seule question qui te martèle le cerveau, c'est ceci : « Si c'était vrai, pourquoi a-t-il attendu la catastrophe pour dévoiler cet état de fait? ». C'est cruel! Très cruel! Entre temps, le public du Colloque, au début très motivé par cet effort collectif, ne comprend pas pourquoi, le gouvernement haïtien, qui avait déjà en cours de production «le Plan de Sauvetage» qu'il vient de publier et dont il devrait connaître la valeur (réelle ou subjective), avait envoyé cette tapageuse délégation de ministres et de diplomates récupérer ces deux journées de réflexion et d'efforts d'un «Think Tank» indépendant qui n'attendait rien de lui. C'est une assemblée de professionnels de gros calibres, mais d'immigrés de bonne foi qui en ont vu bien d'autres, car, ils furent par le passé témoins ou victimes du jeu habile des politiciens dans l'art des promesses creuses et qui ne voient dans la diaspora qu'une vache à lait. La tentation de séquestrer le Forum par ce premier Ministre flamboyant les a tous déroutés. Ne serait-ce la gaffe monumentale du «Gâteau de la construction», ce dernier aurait été transporté en triomphe dans les rues de Montréal par les premiers idiots venus.

Le doute avéré

Sans document, sans chiffres, les mains nues, Monsieur Bellerive vient nous parler de contrats de pétrole. Sur quoi se base-t-il? Avons-nous été roulés depuis toujours. Sommes-nous les dindons de la farce. Sommes-nous assis sur une «piscine» d'hydrocarbures, comme le prétendent certains? Le Gouvernement, a-t'il reçu un ordre des propriétaires mythiques de cette «piscine»? Ah oui! Nous flottons sur du pétrole et puis nous quémandons. La belle histoire! Haïti est un assisté social de l'humanité. Monsieur le Premier Ministre, je peux vous affirmer que oui, nous avons quelques traces d'hydrocarbure en Haïti. Oui, vos prédécesseurs, les plus grands «apaches» que la terre aient connus, à part Estimé et Aristide, ont retenu les services des compagnies spécialisées en forage et en exploration pétrolière, telles les Atlantic Refining (1950), Knappen- Tippen-Abbet, (1959), et dernièrement Geo Explorer (2008). En réalité, le jeu n'en valait pas la chandelle. La quantité connue a toujours été négligeable. Elle n'est pas rentable. Cela a toujours été de la mise en scène d'un plus intelligent que le Maître de céans.

Voici le processus : A l'arrivée de chaque nouveau Président, le Haut-Fonctionnaire titulaire du dossier des Mines, pour consolider son poste, commence par flatter le locataire du Palais avec un dossier bidon aux chiffres astronomiques en contenu de barils de pétrole. Ce nouveau venu qui caresse toujours le rêve secret de changer son statut de locataire en propriétaire du Palais, tombe dans le panneau. Il investit des millions en recherche au bénéfice d'une compagnie étrangère et de son roublard de ministre. Le résultat, à son grand désespoir, souligne la non-rentabilité du sujet. «Ya gain tan quitté sotte». Face à son échec, car son rêve de « Présidence à Vie » y était greffé, il laisse courir le bruit de la « Propriété stratégique des États-Unis ». Question simpliste- Pourquoi les présidents des 500 partis politiques actuels n'utilisent pas ce dossier pour promouvoir leur candidature? Ils ne sont pas si fous. Ils croient, eux aussi les pauvres, dans le mythe de la « propriété stratégiques des USA » et ne veulent pas entraver les marches du Palais. «Tout le monde veut aller au ciel. Personne ne veut mourir » dit la chanson.

Posons une hypothèse : L'International propose de reconstruire Haïti aux coûts de 14 milliards de dollars. Au prix du baril présentement, n'importe quel homme d'affaires avisé ou n'importe quelle compagnie à la recherche de profits garantis, se prévaudrait de ce droit et présenterait sa proposition en bonne et due forme à nos gouvernants. Si notre or noir était rentable, les affairistes internationaux se seraient alignés en fil indienne au pied de René Préval. J'ai visité le site des «Ressources naturelles» de la République Dominicaine avec qui nous partageons la «piscine», excusez, l'île. A part le nickel, la bauxite, l'or, l'argent, le marbre, le charbon, le granit, aucun mot commençant par la lettre «P» ne figure sur sa liste des Ressources Minérales. En conséquence, permets que je déduise cette comique conclusion de cet axiome. L'Île entière nage sur une «piscine», le 1/3 (Haïti) est constitué d'hydrocarbures, l'autre 2/3 (La Dominicanie) en eau saline. Mieux vaut en rire que d'en pleurer. Sur le site internet Rigzone.com, une autorité en la matière, spécialisée dans l'industrie du pétrole et du gaz, j'ai parcouru la liste des pays possédant du pétrole en exploitation ou non, le nom d'Haïti n'y figure pas non plus. Par contre, le site parle du pétrole de Cuba.

En effet, depuis 1984, Cuba produit des quantités non négligeables de pétrole, 16 000 barils par jour (bbl/j) à 74000 bbl/j en 2006. D'après l'EIA (Energy Information Administration), les réserves prouvées seraient de 750 millions de barils d'un pétrole en général plutôt lourd nécessitant un traitement spécial. Le brut est extrait essentiellement dans la province de Matanzas et en offshore dans le bassin du golfe du Mexique. Cuba a souligné en 2008 la découverte dans le Golfe, d'importantes nouvelles réserves estimées à 20 milliards de barils. Notons que l'U.S. Geological Service n'a pas modifié ses propres estimations indiquant que Cuba possèderait seulement 4,6 milliards de barils de réserve dans cette région.

Les nouveaux gisements qui soutiennent ces nouvelles estimations se situent dans l'enclave des 112.000 kilomètres carrés de la partie du Golfe du Mexique appartenant à Cuba. Cependant, d'après Rigzone.com, les experts sont dans tous les cas certains que des réserves inexploitées considérables de pétrole sont situées dans cette zone. Si ces estimations se vérifient, ces réserves de 20 milliards de barils de brut placeraient Cuba dans le peloton de tête des pays possédant les plus fortes réserves de la planète, du moins après les pays du Golfe Persique et le Venezuela.

La question qui tue.

Dans la logique des mythes véhiculés, dans le fantasme des adeptes de la théorie des complots internationaux, les Américains se seraient naturellement acharnés sur Cuba au lieu d'Haïti. La manne de Cuba a été prouvée depuis le début des années 80. Or, le pétrole dans le Golfe du Mexique est très loin d'Haïti, mais à quelques minutes de Miami. Par conséquent, les ambitions des Américains seraient vivement enflammées à l'idée qu'une piscine d'or noir flotte dans leur arrière-cour. Se sont-ils trompés d'île ?

Revenons sur terre

Monsieur, le Premier Ministre, loin de moi l'idée de mettre en doute votre assertion. Je demeure lié à ma gentillesse habituelle. Par contre, si vous êtes sûr de l'existence de cette richesse, la donne vient de changer. Je vous propose ceci, de :

Demander à la Communauté Internationale de surseoir à son aide. Vous avez présentement et en toute urgence une meilleure offre à lui proposer. Vous voulez hypothéquer auprès d'elle la «piscine» d'or noir d'Haïti pour 30 ans. Comme obligation, elle n'aura qu'à reconstruire immédiatement Haïti dans son ensemble, de A à Z, subvenir indistinctement aux besoins de chaque individu sur tous les plans, de sa naissance à sa mort, de partager après coup avec le gouvernement, une partie du bénéfice émergent.

Attention, ne nous sous-estimons point. En 1938, le Roi Abd Al Aziz Ibn Saoud et l'Arabie Saoudite avaient contracté une telle alliance avec les Américains. Ils n'en sont pas morts pour autant. Au contraire !

Monsieur le premier Ministre, je brûle du désir d'être déçu. Rendez-moi ce service. J'attends la vérité.


Max Dorismond 2010-03-23

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