lundi 25 janvier 2010

La qualité du béton et du fer expliquent l'étendue des dégâts en Haïti


C'est le constat que dressent les deux experts français de l'ONG Architectes de l'urgence après avoir étudié pendant trois jours une trentaine de grands bâtiments publics de Port-au-Prince.

La mauvaise qualité du béton et celle du fer explique l'étendue des dégâts du séisme, ont indiqué lundi à l'AFP deux experts français de l'ONG Architectes de l'urgence, après avoir étudié pendant trois jours une trentaine de grands bâtiments publics de Port-au-Prince.

Lundi 19 janvier, les deux architectes de l'urgence se sont rendus à la centrale électrique de la capitale, une construction profondément ébranlée, dont les employés ont peur de reprendre le travail sans l'avis de spécialistes. L'analyse a déterminé que la centrale ne présentait pas de risques majeur, et que le travail pouvait reprendre.
De même, alors que l'approvisionnement de la capitale en fuel devient chaque jour plus problématique les architectes ont expertisé le siège de Total qui a été durement touché. Quelques travaux de renforcement permettraient de réhabiliter les parties dangereuses tout en reprenant le travail dans la partie moins touchée. Une proposition a été également faite de poser des bureaux provisoires type modulaires dans la cour pour pouvoir continuer l'approvisionnement des stations de la ville.

Auparavant, les deux experts ont visité le lycée français de la ville. "C'est un bâtiment très bien construit, il n'y a aucun problème et nous avons donné notre feu vert pour qu'on y installe un hôpital de campagne" a expliqué à l'AFP Patrick Coulombel, président des Architectes de l'urgence.
"Nous avons aussi effectué une expertise de l'hôpital du centre de diagnostic des traitements intégrés (CDTI) et avons remarqué que ce bâtiment souffrait d'un défaut de conception en raison d'ouvertures trop nombreuses au rez-de-chaussée" explique de son côté l'architecte Serge Guno. "On a conseillé de fermer les chambres, mais comme les chirurgiens ont absolument besoin des blocs opératoires au rez-de-chaussée, on a donné notre feu vert, mais avec d'importantes précautions. Notre hantise, ce sont les répliques" ajoute M. Guno.

La mauvaise qualité du béton et du fer est désignée comme la principale responsable de la fragilité de tous les bâtiments visités, qu'ils se soient effondrés ou fissurés.
"Les fers étaient mous, on pouvait les tordre à la main, et ils étaient lisses alors qu'un bon fer à béton est strié. Quant au béton, la proportion de ciment est mal dosée, sans parler de la mauvaise qualité des agrégats" affirme Patrick Coulombel.
"Pour faire des économies, on utilise un mauvais acier, on rogne sur le ciment, et puis le béton, c'est très technique, compliqué, et il manque ici des personnes capables de mettre en oeuvre un béton de qualité", ajoute-t-il.
Il faut éviter les bâtiments longs, dit-il encore, et réfléchir à la forme des constructions.
Une pyramide ne tombe pas, souligne l'expert, mais "les gens n'ont pas forcément envie d'habiter une pyramide". Quelque 60% des bâtiments d'Haïti ne respectent pas les normes, estiment les deux spécialistes.

Le lieu de construction est aussi important, estime M. Guno, qui exerce dans l'île française de Martinique. "Les Haïtiens ne sont pas les seuls à faire des erreurs, en Martinique, le collège Dillon 2 a été construit il y a 18 ans sur une faille" précise-t-il.


Jacques Guillon
| Source AFP

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